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L’influence de la course monétaire de l’euro sur l’intérêt d’achat des biens à Paris

L’évolution du taux de change de l’euro constitue un paramètre déterminant pour les investisseurs immobilier, tant nationaux qu’internationaux. Une monnaie forte renchérit le prix des actifs parisiens pour les acheteurs étrangers, tandis qu’une dépréciation de l’euro accroît leur pouvoir d’achat et stimule la demande. Dans un contexte de fluctuations importantes du taux de change USD/EUR en 2025, comprendre ces dynamiques est essentiel pour évaluer la vitalité du marché parisien.

1. Contexte des fluctuations de l’euro en 2024‑2025

Depuis la mi‑2024, l’euro a connu une appréciation de près de 12 % face au dollar américain, atteignant des niveaux proches de 1,12 USD pour 1 EUR début 2025. Cette hausse s’explique par la résilience économique de la zone euro, la politique monétaire relativement prudente de la BCE et les incertitudes fiscales et politiques aux États‑Unis. Parallèlement, des tensions commerciales entre l’UE et les États‑Unis, ainsi que des risques géopolitiques (tarifs éventuels jusqu’à 30 % sur les exportations européennes), ont accentué la volatilité de la monnaie unique.

2. Effets d’une euro fort sur les investisseurs étrangers

2.1. Renchérissement du prix d’acquisition

Pour un investisseur libellé en dollars, une euro à 1,12 USD signifie qu’un appartement de 1 000 000 € coûte plus de 1 120 000 USD, contre 1 000 000 USD si l’euro était à la parité. Cette hausse du coût d’acquisition peut décourager une partie des acheteurs hors zone euro, notamment les Américains ou les Asiatiques, dont le pouvoir d’achat diminue mécaniquement. Les volumes de transactions en devises non‑euro ont ainsi reculé en début d’année, illustrant la sensibilité du marché parisien aux variations de change.

2.2. Impact sur le rendement projeté

Au‑delà du prix d’achat, un euro fort réduit également la rentabilité locative et la plus‑value attendue en devises étrangères. Les revenus locatifs et les plus‑values éventuelles, convertis en monnaie d’origine, se voient amoindris. Cette perspective de rendement diminué freine l’appétence des investisseurs internationaux qui valorisent non seulement la stabilité de l’immobilier parisien, mais aussi la performance financière en monnaie étrangère.

3. Bénéfice d’une euro faible pour les acheteurs internationaux

3.1. Augmentation du pouvoir d’achat

À l’inverse, une dépréciation de l’euro – observée ponctuellement lors d’épisodes de tensions commerciales ou de revirements de politique monétaire américaine – accroît le pouvoir d’achat des investisseurs en dollars ou en livres sterling. Par exemple, si l’euro tombe à 0,95 USD, le même appartement à 1 000 000 € revient à seulement 950 000 USD. Cette moindre barrière à l’entrée suscite un regain d’intérêt, comme on l’a vu en 2019 lors d’une légère baisse de l’euro.

3.2. Effet « goodwill » sur la vente future

Les acheteurs anticipent également un scénario d’inversion du taux de change, où une euro plus forte à moyen terme conforterait la valeur de leur investissement en USD ou GBP. Ce « pari » sur la remontée de la monnaie unique encourage l’acquisition lors des phases de faiblesse de l’euro, entraînant une hausse des volumes de transactions de non‑résidents.

4. Les profils d’investisseurs les plus sensibles au taux de change

4.1. Investisseurs américains

Les Américains, dont la devise tend à se renforcer en période de remontée des taux de la Fed, sont particulièrement attentifs au taux USD/EUR. Un euro jugé « trop fort » limite leur appétit pour le marché parisien, tandis qu’une euro faible lors de leurs placements leur permet de diversifier efficacement leur portefeuille géographique.

4.2. Investisseurs britanniques

Après le Brexit, la livre sterling demeure moins volatile par rapport à l’euro. Toutefois, une livre forte a historiquement poussé les Britanniques à acheter en zone euro, y compris à Paris, pour profiter de prix attractifs en livre. Inversement, une sterling faible freine leur demande.

4.3. Investisseurs asiatiques et du Moyen‑Orient

Moins exposés en USD ou GBP, ces investisseurs opérant en yuan, dirham ou riyal combinent souvent couverture de change et arbitrages fiscaux via des sociétés écrans. Leur sensibilité au taux EUR/USD existe néanmoins, car ils convertissent presque toujours leurs devises dans l’une des deux principales monnaies internationales avant de passer à l’euro.

5. Corrélation entre taux de change et tendances du marché parisien

Une étude de l’ECB publiée en février 2025 souligne que les intentions d’achat dans la zone euro ont seulement été temporairement affectées par la hausse des taux de change, et qu’elles affichent aujourd’hui un net rebond. À Paris, où la demande est structurellement soutenue, l’impact négatif d’un euro fort a été relativement limité, la ville restant perçue comme un « refuge ». Néanmoins, les arrondissements les plus prisés (1er, 4e, 6e) ont vu un ralentissement plus marqué des volumes de transactions que les périphéries (19e, 20e) moins soumis à la pression étrangère.

6. Stratégies d’atténuation des effets de change

6.1. Couverture de change et swaps de devises

Les grands investisseurs institutionnels utilisent couramment des instruments financiers tels que les contrats forward ou les options de change pour se protéger contre la variation du taux EUR/USD. Ces produits, proposés par les banques privées, permettent de « geler » un taux à l’avance et de garantir le coût d’achat en devise d’origine.

6.2. Financement en monnaie locale

Certains acheteurs obtiennent des prêts en USD via des filiales de banques américaines opérant en France, réduisant ainsi l’exposition au risque de change. Cette technique, toutefois, implique des marges de crédit souvent plus élevées et des garanties supplémentaires.

7. Rôle de la BCE et perspectives monétaires

La Banque centrale européenne (BCE) a annoncé en juillet 2025 la suspension de son cycle de baisses de taux, maintenant son principal taux directeur à 2 % après huit réductions consécutives. L’objectif étant de surveiller l’inflation et l’impact d’un euro trop fort sur les exportations, la BCE se veut prudente face à tout nouvel affaiblissement de la monnaie unique, tandis que les marchés spéculent sur d’éventuelles baisses fin 2025 ou début 2026.

Les prévisions du staff de la BCE tablent sur une légère décélération de l’euro courant 2025, avec un taux dessous la parité USD/EUR au premier trimestre, avant une stabilisation aux alentours de 1,00 USD. Cette projection laisse entrevoir un regain d’intérêt pour l’immobilier parisien en milieu d’année, notamment parmi les acheteurs américains.

8. Impacts concrets sur le marché immobilier parisien

8.1. Volumes de transactions

Selon la Chambre des notaires de Paris, le volume des ventes dans la capitale a diminué de 4 % au premier trimestre 2025, notamment en raison de la hausse de l’euro et de la remontée des taux hypothécaires. Toutefois, sur un an, la baisse se limite à 1 %, signe d’une forte résilience du marché.

8.2. Évolution des prix

Les prix au mètre carré ont connu une légère correction de – 2 % entre mi‑2024 et mi‑2025, partiellement imputable au contexte de change et à la pression sur le pouvoir d’achat des acheteurs étrangers. Ce recul modéré a toutefois redonné un peu de marge de négociation, notamment dans les arrondissements centraux.

9. Perspectives et recommandations

9.1. Pour les acheteurs étrangers

  • Surveiller le taux EUR/USD : privilégier les périodes de faiblesse de l’euro pour négocier les acquisitions.
  • Utiliser des couvertures de change afin de sécuriser le coût définitif en monnaie d’origine.
  • Anticiper les décisions de la BCE : tout signe de durcissement monétaire en zone euro pourra renforcer l’euro.

9.2. Pour les investisseurs français

Même s’ils n’achètent pas en devise étrangère, les acquéreurs hexagonaux doivent intégrer l’influence de la demande internationale, fortement corrélée aux fluctuations de l’euro. Une euro faible attire plus de capitaux étrangers, soutenant la valorisation patrimoniale.

La « course » de l’euro, oscillant entre phases de force et de faiblesse, exerce une influence tangible sur le marché immobilier parisien. Si un euro fort peut freiner l’engouement des acheteurs américains et britanniques, une dépréciation ouvre des fenêtres d’opportunité pour divers profils d’investisseurs. Les fondamentaux de la capitale – rareté du foncier, attractivité culturelle et économique, stabilité politique – demeurent solides, garantissant une résilience face aux soubresauts monétaires. Maîtriser les stratégies de couverture et suivre de près les décisions de la BCE sont les clés pour optimiser son entrée sur ce marché, où chaque dixième de centime peut représenter plusieurs dizaines de milliers d’euros.